Aurélie HUSSON (1980, Née à Nancy, Réside à Maxéville)

Aurélie Husson nous emmène à Rio ou plus précisément dans l’espace de ses franges. Elle évoque de la sorte une des questions importantes (qui ne lui a pas échappé en tant qu’architecte) du débat de ces vingt dernières années sur la ville : celle de ce que le sociologue Marc Augier a appelé les non-lieux.
Son travail aurait pu tendre à un état des lieux objectif de l’obsolescence du quartier portuaire de cette mégalopole brésilienne ou s’attacher à esthétiser la vétusté de son patrimoine bâti et rendre ainsi hommage à son histoire.
Mais c’est à l’espace résiduel laissé par un viaduc et à sa qualité capacitante que Aurélie Husson confie la responsabilité d’évoquer les conditions urbaines contemporaines de ce territoire. Elle troque la distance contre l’immersion. Le cadrage, la précision, la lumière, la narration intelligible ne sont plus les questions fondamentales. Les jugements de valeur sont balayés. L’enjeu est ailleurs, dans la perspective qui justifie l’acte photographique. Ce « monde du dessous » n’est pas un non-lieu tout simplement parce que, loin d’être indéterminé, il réfère à d’autres clefs de lectures. Les règles de son appropriation par une population précarisée renvoient à d’autres conventions que l’écriture de la dissolution, de la dérobade, de l’évanouissement exploré par Aurélie Husson rend efficacement comme terrain vague du visible. Ses photographies instruisent au-delà d’elles-mêmes sur les conditions d’émergence de leur surgissement et c’est ce qui leur confère leur valeur. La ville n’y est pas un paysage, pas plus que ses habitants n’y sont des motifs. Ils sont les matériaux nécessaires à la révélation de leurs réalités impalpables.

M.M